Les Fâcheux Le texte de la Scène 2 Acte 1 de la pièce de Molière : Les Fâcheux
ÉRASTE Mais vois-je pas Orphise? Oui, c'est elle qui vient. Où va-t-elle si vite, et quel homme la tient? (Il la salue comme elle passe, et elle, en passant, détourne la tête.) Quoi? me voir en ces lieux devant elle paraître, Et passer en feignant de ne me pas connaître! Que croire? Qu'en dis-tu? Parle donc, si tu veux. LA MONTAGNE Monsieur, je ne dis rien, de peur d'être fâcheux. ÉRASTE Et c'est l'être en effet que de ne me rien dire Dans les extrémités d'un si cruel martyre. Fais donc quelque réponse à mon cœur abattu. Que dois-je présumer? Parle, qu'en penses-tu? Dis-moi ton sentiment. LA MONTAGNE Monsieur, je veux me taire, Et ne désire point trancher du nécessaire. ÉRASTE Peste l'impertinent! Va-t'en suivre leurs pas, Vois ce qu'ils deviendront, et ne les quitte pas. LA MONTAGNE, revenant. Il faut suivre de loin? ÉRASTE Oui. LA MONTAGNE, revenant. Sans que l'on me voie Ou faire aucun semblant qu'après eux on m'envoie? ÉRASTE Non, tu feras bien mieux de leur donner avis Que par mon ordre exprès ils sont de toi suivis. LA MONTAGNE, revenant. Vous trouverai-je ici? ÉRASTE Que le Ciel te confonde, Homme, à mon sentiment, le plus fâcheux du monde! (La Montagne s'en va.) Ah! que je sens de trouble, et qu'il m'eût été doux Qu'on me l'eût fait manquer, ce fatal rendez-vous! Je pensais y trouver toutes choses propices, Et mes yeux pour mon cœur y trouvent des supplices.
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